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Foyer Albert Thomas – Episode 2

Le 31 décembre, nous nous rendions au Foyer Albert Thomas pour rencontrer les salariés et les accueillis, pour qu’ils nous exposent leur point de vue sur « la situation », c’est à dire la fermeture du foyer, le licenciement des salariés et les possibles solutions de « relogement » des accueillis.
15 jours plus tard, la polémique a enflé, le conseil d’administration de l’association qui gérait la structure – 60000€ de déficit – ne s’est toujours pas manifesté, tandis que plusieurs hommes et femmes politiques locaux se sont exprimés sur le sujet; le comité de soutien bénévole aux accueillis et salariés est sur le qui-vive. Mais eux, salariés et accueillis, qu’en disent-ils?

Revue de presse


Dans cet article du 11 janvier 2017, « A Tours le centre d’hébergement d’urgence fermé » sur le site de Libération, on prend pleinement la mesure de la dimension politique de l’affaire, et des intérêts contraires de chacun. Résumé très simpliste : la méchante mairie/préfecture de droite versus les gentils de gauche qui défendent les droits humains, dont des horribles militants rouges, couteau entre les dents. Deux socialistes s’expriment dans cet article avec pudeur, un membre du comité de soutien y dénonce les choix d’une mairie qui ne s’exprime pas, tandis que le porte-parole de la Préfecture s’interroge sur la responsabilité des salariés non diplômés -toujours actifs auprès des accueillis, avec ou sans diplôme – dans la gestion trouble du C.A. mutique laissant un trou de 60000€. C’est le seul article où on lit le nom des salariés et des accueillis et où on rapporte leurs propos.

Pour connaître plus précisément le point de vue de la mairie de Tours et de la Préfecture, il faut aller sur le site info-tours.fr : « Foyer Albert Thomas de Tours : ce n’est pas un collectif qui fait la loi »  On nous rappelle ici que la mairie de Tours est propriétaire des murs du foyer, qui devrait être fermé depuis le 26 décembre 2016, qui ne l’est pas, et qui selon m. Babary, n’est plus géré – par les autorités – et échappe à tout contrôle. Dans l’article de Libération, on lisait plutôt que le foyer était en quelque sorte « autogéré » et n’avait « jamais été aussi propre »… On apprend par ailleurs que dans ce foyer d’accueil de nuit – les accueillis ne sont pas censés y rester la journée, ils sortent le matin et reviennent le soir, c’est expliqué dans notre émission du 31 décembre – la représentante de la DDCS n’a pas pu rencontrer les résidents pour les recenser en s’y rendant un mercredi après-midi, et pis, qu’elle en a été empêchée – par qui? On prend également conscience de la complexité de la gestion du « drame humain » – selon l’expression d’un élu socialiste cité dans Libération – selon le profil de la personne à la rue : demandeurs d’asile, réfugiés et SDF « commun » ne relèvent pas des mêmes dispositifs, et le « tri » aurait été mal fait à Albert Thomas, mais qui en est responsable? L’article rapporte aussi que les autorités n’auraient pas été alertées sur les graves dysfonctionnements administratifs qui ont mené à la liquidation du foyer. Or, dans notre émissions du 31 décembre, les salariés affirmaient avoir alerté sur la gestion hasardeuse des financements…

Enfin, dans cet article du 12 janvier 2016, sur le site 37° « Statu quo et manifestation pour le foyer Albert Thomas »  , on nous rapporte les positions de m. le Maire et de m. le Préfet, face à celles du collectif de soutien – composé de militants, qui ne sont pas les accueillis et les salariés. On y apprend qu’un repreneur devrait être trouvé pour le foyer d’ici un mois et demi. Et à la lecture de cet article, il semble que le foyer est occupé par des fauteurs de troubles – les membres du collectif de soutien – qui barrent l’accès à la représente de la DDCS, ce qui pourrait contraindre la mairie et la préfecture à passer par « la voie judiciaire » et » ordonner l’expulsion ».


Allons voir!


Etonnés par nos lectures, nous avons décidé de nous rendre à nouveau sur place, pour rencontrer ceux qui semblent avoir disparu du débat : les salariés bientôt au chômage, et les accueillis bientôt à la rue.
Quand nous arrivons au foyer, pas un bruit dans la rue, pas de banderole sur la porte, ni d’autocollant syndical. On sonne, on nous ouvre simplement. Dans la cour, deux jeunes hommes du collectif de soutien préparent avec soin une banderole pour la manifestation de 18h. C’est l’après-midi, et il n’y a pas grand monde dans le foyer, les accueillis sont sortis pour la plupart, selon le fonctionnement habituel des lieux. L’un d’eux nous conduit au bureau où se réunissent les salariés. Ils viennent de lire l’article paru sur le site de 37° et sont partagés entre colère et dépit, de se voir mis en cause dans la « gestion trouble » du foyer, voire d’être taxés d’incompétence. Ils rassemblent leurs idées, pour écrire un communiqué, que l’on peut lire sur le site La Rotative : « Foyer Albert Thomas : réponse des salariés au maire et au préfet »
Deux accueillis, que nous avons déja rencontrés lors de notre première venue, acceptent simplement de répondre à quelques questions. On part s’installer dans une salle de réunion. Les couloirs sont calmes, propres; la cuisine bien tenue : on se demande presque où certains ont pu humer un rance parfum d’anarchie, dans ce foyer qui n’a vraiment rien d’un squat…


Parole aux résidents


Où deux résidents nous parlent de la visite « surprise » de la DDCS, qu’ils n’ont pas refusé de recevoir, mais n’ont pas pu renseigner puisque tous les accueillis concernés étaient sortis… comme l’exigeait le fonctionnement habituel du lieu…
Où l’on apprend que les résidents ne refusent pas de quitter le foyer Albert Thomas, pourvu qu’ils ne se retrouvent pas à la rue à nouveau, pas plus qu’ils ne s’opposent aux décisions de la Préfecture. Où l’on apprend que les résidents refusent d’entrer dans le débat politique, qui ne les intéresse pas.
Où l’on apprend que la vie suit son cours « normal » à l’intérieur du foyer : bouffe, calme, et sécurité.
Où l’on mesure combien la distinction entre « public traditionnel » et « public »… autre inquiète et blesse.
Où l’on apprend les événements à venir, samedi 14 : journée « portes ouvertes » au foyer 10h-18h, et événement avec La Barque.


Parole aux salariés


Après nous avoir proposé un café, c’est l’ancien directeur des lieux qui prend la parole, pour dire son exaspération.
Où l’on apprend que les SDF et les demandeurs d’asile n’arrivent pas « comme ça » au foyer, mais selon une procédure spécifique.
Où l’on apprend l’effet du démantèlement de la jungle de Calais sur les centre d’accueil.
Où l’on apprend qu’il n’y a pas vraiment d’endroit où mettre les non-SDF.
Où l’on apprend la défiance des autres associations vis à vis des gestionnaires de l’association du foyer, et que les salariés avaient déjà signalé des dysfonctionnements, que l’association gestionnaire avait été condamnée par les prud’hommes.
Où l’on mesure les effets de la loi du « 1er novembre » et que les accueillis non-SDF-français ne peuvent pas aller en CADA.
Et en conclusion : « On brasse de l’air! »


samedi 14 : journée « portes ouvertes » au foyer 10h-18h